L’importance de la notion d’externalité dans les réflexions sur les mobilités

             Les défis contemporains liés aux transports exigent une réflexion approfondie sur les conséquences des choix en matière de mobilité. Au cœur de cette réflexion se trouve la notion cruciale d’externalité. Dans cet article, nous explorerons pourquoi il est impératif de raisonner à partir de cette notion lorsque l’on aborde les enjeux complexes du secteur des transports.

 

L’externalité caractérise le fait qu’un agent économique crée, par son activité, un effet externe en procurant à autrui, sans contrepartie monétaire, un avantage ou au contraire une nuisance sans compensation.

Plus précisément, dans le contexte des transports, l’externalité se réfère aux effets indirects d’une action ou d’une décision liée à la mobilité, qui impactent des parties tierces non directement impliquées dans cette action. Les externalités représentent les retombées, souvent non intentionnelles, des choix de déplacement.

 

La notion d’externalité doit être utilisée dans les réflexions qui portent sur les mobilités, car les choix de déplacement provoquent beaucoup d’effets indirect sur l’ensemble de la société :

1) La congestion routière :

Nous avons tous déjà connue le fait d’être coincés dans une file interminable de voiture pendant des heures. C’est ce qu’on appelle la congestion routière, et Georgina Santos la décrit comme le moment où il y a tellement de voitures sur la route que tout est bloqué. Chaque voiture supplémentaire agit comme une goutte d’eau qui fait déborder le vase, ralentissant tout le monde et augmentant le temps que vous passez coincé dans votre voiture.

Cela peut sembler anodin, mais cette congestion a un coût bien réel, que les économistes peuvent calculer. En termes simples, plus vous restez coincé dans les embouteillages, plus vous perdez du temps et plus ça vous coûte cher. C’est comme si chaque minute passée immobile dans votre voiture était une minute de votre vie que vous ne récupérerez jamais, et une dépense d’essence supplémentaire qui pèse sur votre porte-monnaie.

On peut donc dire que la congestion routière ne se contente pas de vous faire perdre du temps, elle vous fait également perdre de l’argent.

Ainsi, une réflexion peut-être menée quant au rôle prédominant de la voiture dans le temps que nous perdons au quotidien ; les transports en commun tel que les bus, les métros ou le trains peuvent aider à nous faire gagner du temps et de l’argent ; le train ayant en plus l’avantage de permettre de travailler sur des dossiers, de se cultiver, de se détendre et donc de « perdre » moins de temps.

2) La pollution de l’air :

La pollution atmosphérique a des répercussions significatives sur la santé humaine. Ces effets peuvent se manifester rapidement, entraînant des problèmes respiratoires aigus tels que des bronchites et des crises d’asthme. Cependant, les conséquences à long terme sont encore plus préoccupantes, avec des impacts sur la durée de vie et des maladies graves comme les bronchites chroniques, les cancers du poumon et les problèmes cardio-vasculaires.

L’un des coupables notoires de cette pollution est le dioxyde d’azote (NO2), émis en grande quantité par les véhicules. Non seulement il irrite nos voies respiratoires, mais il contribue également à l’acidification de l’environnement, affectant la qualité des milieux naturels.

Les chiffres recensés en 2019 sont éloquents : plus de la moitié des polluants nocifs NO2 provenaient du transport routier, dépassant largement les émissions de l’industrie manufacturière, de la construction et de l’agriculture. Les gaz d’échappement des voitures sont ainsi désignés comme l’une des principales causes de ce problème de santé publique.

Repenser notre manière de nous déplacer devient alors crucial, réduire les problèmes de congestion routière permettra entre autre d’économiser de l’énergie, et de préserver la qualité de l’air que nous respirons au quotidien. Choisir des alternatives de transport plus propres, tel que les transports en communs, devient une nécessité, non seulement pour économiser l’énergie, mais surtout pour sauvegarder notre bien le plus précieux : notre santé.


3) Les accidents :

Un accident est un évènement imprévu qui entraine des dommages. Tout activité peut engendrer des accidents, mais certaines présentent davantage de risques que d’autres.

Les statistiques révèlent que le transport ferroviaire enregistre un nombre nettement inférieur d’accidents par rapport à l’automobile. Les vastes infrastructures ferroviaires, combinées à des protocoles de sécurité stricts, contribuent à minimiser les risques et à maintenir un niveau élevé de sécurité pour les usagers.


4) Les nuisances auditives :

Le bruit, cette perturbation sonore qui fait vibrer nos tympans et qui peut rapidement se transformer en une cacophonie insupportable, n’est pas simplement une nuisance auditive. C’est un phénomène acoustique
complexe, capable de générer des vibrations désordonnées jusqu’aux cellules de notre cerveau. La gêne qu’il provoque dépend de divers facteurs tels que son intensité, sa fréquence et sa continuité.

Qu’il s’agisse du tumulte de la circulation, du rugissement industriel ou des activités récréatives bruyantes, le bruit est devenu la première source de désagrément environnemental. En Europe, près de 80 millions de personnes, soit 22% de la population, sont exposées à un niveau de bruit dépassant les limites acceptables, fixées à 65 dB(A). Environ 8% de la population européenne endure des niveaux de bruit dépassant les 70 dB(A), qualifiés de véritables points noirs sonores.

Les conséquences du bruit vont bien au-delà de l’inconfort auditif. Elles se font sentir sur notre santé de manière étendue, engendrant des impacts psychologiques, physiques, sociaux et même économiques.
Vivre dans un environnement bruyant peut perturber notre équilibre mental, affecter notre bien-être physique et social, et même entraîner des coûts économiques liés aux soins de santé nécessaires pour faire face aux troubles
induits par le bruit.

En résumé, le bruit n’est pas simplement une gêne passagère, c’est un problème de santé publique majeur, malheureusement souvent sous-estimé. Repenser notre urbanisme et nos modes de vie pour réduire cette
forme d’externalité sonore devient crucial pour préserver notre bien-être général et favoriser des environnements plus paisibles et sains.

En effet selon les scientifiques, l’automobile est le principal facteur de nuisance auditive, et de loin.


5) Les atteintes à la biodiversité :

La biodiversité est un terme qui englobe la richesse infinie du monde vivant sous toutes ses formes. Elle devient une préoccupation cruciale dans le contexte de l’aménagement du territoire. Selon l’article 2 de la Convention sur la diversité biologique, elle englobe non seulement la variabilité des organismes vivants, mais aussi la diversité au sein des espèces, entre les espèces et des écosystèmes.

L’impact de la construction d’infrastructures telles que routes, voies ferrées, ports et aéroports entraîne un effet direct sur la biodiversité locale en raison de l’artificialisation des sols. Malgré l’absence d’études mesurant précisément cette externalité, il semble logique de penser que plus nous construisons d’infrastructures, plus cette externalité négative devient significative.

En l’absence de données spécifiques, quantifier précisément l’impact devient complexe, cependant, il est indéniable que chaque nouvelle route, voie ferrée ou aéroport perturbe significativement l’équilibre délicat de la biodiversité locale. L’artificialisation des sols qui en découle entraîne inévitablement la perte d’habitats naturels, exerçant des pressions dommageables sur la flore et la faune indigènes.

La relation complexe entre le développement des infrastructures et la biodiversité nécessite une attention particulière. Repenser la manière dont nous planifions et construisons nos infrastructures devient essentiel pour minimiser l’impact négatif sur la biodiversité locale et préserver la variété infinie du monde vivant qui nous entoure.

Une réflexion profonde doit être menée avant de lancer de nouveaux projets autoroutiers qui sacrifieront obligatoirement des milliers de kilomètres de biodiversité ; il faut questionner leur nécessité au regard du million de kilomètres de routes qui existent déjà en France.



   Ainsi comme nous l’avons vu, raisonner à partir de la notion d’externalité dans le domaine des transports est essentiel pour évoluer vers un système de mobilité plus durable, efficient et équitable. En intégrant ces externalités dans les analyses et les décisions, les autorités organisatrices de mobilités, ainsi que les citoyens peuvent forger un avenir où la mobilité n’est pas seulement un moyen de déplacement, mais un levier pour construire des sociétés résilientes, moins dangereuses, plus agréable et respectueuses de l’environnement. En embrassant cette perspective, nous jetons les bases d’un avenir où les transports deviennent une force positive pour la planète et les communautés.